Musique
-
En fondant un conservatoire de musique dans sa ville natale, François Bartholony pensait consolider l'harmonie civique. Pour "nationaliser" la musique à Genève, il imagina d'importer des partitions sérieuses (signées Haendel, Mozart ou Beethoven), de mettre en place une discipline stricte de l'apprentissage et de faire du solfège la clef de voûte de l'édifice. Dans l'enceinte de l'école, le comité de notables philanthropes dont il s'était entouré imposa non sans mal dans les classes l'abandon des romances et des pièces de salon, la soumission des élèves (jeunes filles de bonnes familles pour la plupart) aux examens et des professeurs aux inspections. Mais le nouvel établissement ne remplaça jamais totalement le riche tissu d'institutions parallèles (Société de Musique, écoles de catéchumènes, Société de Chant sacré, etc...) et de maîtres privés qui oeuvraient eux aussi à former des amateurs. En s'enfonçant dans les archives - celles de l'école et surtout celles réputées peu musicales des Archives d'État ou de la Bibliothèque Publique et Universitaire de Genève, on découvre la vivacité de ces formes d'initiation à la musique ainsi que les aléas du projet bartholonien. Un projet dont l'histoire est bien plus sinueuse que le racontaient les discours officiels. L'institution d'une nouvelle manière de faire la musique, devenue la nôtre, ne s'est en effet imposée que lentement, au prix d'un travail permanent d'ajustement du dessein initial du fondateur à une cité artistique et sociale en perpétuelle transformation. Le but de cette enquête est de mettre en lumière ces déplacements, tout en restituant un conservatoire "en situation", autrement dit en n'isolant pas l'école de musique genevoise du monde dans lequel elle s'insérait.
-
-
-
-
Loin de se réduire à un discours sur les oeuvres, l’analyse est aussi une pratique musicale impliquant des actes de lecture, d’écoute et d’écriture. Un groupe de musicologues (analystes et historiens) et de chercheurs venus d’autres disciplines s’interroge dans cet ouvrage sur l’origine et la signification des gestes quotidiens du travail analytique : chiffrage, transcription, réduction au piano, segmentation, écoute intérieure, construction d’une argumentation, fabrication de tableaux, qui donnent forme au propos de l’analyste et qui ont fini par se rejoindre dans une discipline que l’on appelle désormais « analyse musicale ». Au fil de l’ouvrage, qui aborde aussi bien la littérature wagnérienne que les transcriptions d’œuvres électroacoustiques, les polémiques autour des théories de Riemann, d’Indy ou Schoenberg que les analyses musicales de Leibowitz, Messiaen, Boulez, Rouget, Forte ou Nattiez, se dessine la généalogie d’un savoir-faire aujourd’hui bien pr©sent dans les conservatoires et les universités, mais dont l’histoire est au fond méconnue.
-
Pendant tout le Moyen Age, la musique n’a cessé de nourrir la spéculation dans les domaines mathématique et philosophique ainsi que d’inspirer l’art et la spiritualité, où elle est conçue comme le fondement de l’harmonie divine et humaine. Réalisant la synthèse de ces traditions, Jean Gerson élabore une théorie de l’ascension mystique à partir de ce modèle musical: au moyen d’une série de correspondances entre musique sensible et vie spirituelle, il décrit une gamme mystique dont les «voix affectives» sont disposées selon des principes empruntés au calcul des intervalles musicaux. Ce «chant du cœur», le Canticordum, que la Vierge Marie a fait entendre de manière incomparable dans son Magnificat trace pour le chrétien le chemin d’un pèlerinage vers Dieu.
Sans jamais réduire la musique audible au rang de simple outil pédagogique, Gerson maintient le «chant de la bouche» dans sa dignité liturgique et anagogique: la voix de la louange demeure un moyen adéquat pour approcher Dieu et le chant du cœur ne vise en fin de compte qu’à prolonger cet élan amoureux de l’âme. Transcendant toutes les formes concevables d’harmonie, la gamme mystique culmine ainsi dans une sorte d’unisson polyphonique avec la Trinité, au sein d’un chatoyant concert aux dimensions de l’univers.
Produisant l’édition critique, accompagnée de leur traduction, des textes consacrés au Canticordum, Isabelle Fabre examine les multiples aspects d’une théorie originale et reconsid¨re l’évolution de la pensée gersonienne, jalon, s’il en est un, de l’histoire de la théologie mystique à la fin du Moyen Age.
-
-
Fondée en 1950 par Eugénie Droz, la collection des Travaux d'Humanisme et Renaissance a réuni, en soixante-cinq ans, plus de 550 titres. Elle s'est imposée comme la collection la plus importante au monde de sources et d’études sur l'Humanisme (Politien, Ficin, Erasme, Budé…), la Réforme francophone (Lefèvre d'Etaples, Calvin, Farel, Bèze…), la Renaissance (littéraire et artistique, Jérôme Bosch ou Rabelais, Ronsard ou le Primatice…), mais aussi la médecine, les sciences, la philosophie, l'histoire du livre et toutes les formes de savoir et d’activité humaine d’un long XVIe siècle, des environs de 1450 jusqu’à la mort du roi Henri IV, seuil de l'âge classique. Les Travaux d'Humanisme et Renaissance sont le navire-amiral des éditions Droz.